Boycie Jones déboula en trombe dans la salle de rédaction de la Gazette du Sorcier. Elle semblait terriblement excitée et enthousiasme. Son visage était fendu par un large sourire et ses longs cheveux blonds flottaient sur ses épaules. Elle s'installa à bureau, jetant un coup d'œil à Gavin avec l'air de dire : "bon et alors ?! Tu ne me demandes pas ce que j'ai ?!" Mais Gavin ne releva pas. Le jeune sorcier était préoccupé. Au bout d'un moment, Boycie poussa un soupir d'ennui et approcha sa chaise de Gavin, l'air grave et boudeur.
B -"Bon, vu que tu ne me poses aucune question, je vais te dire ce qu'il y a !"
G -"Euh...Désolé... Je suis....!"
B -"Chut ! Devine quoi ! J'ai appris que Sam Larcen, tu sais le trafiquant de chaudrons avait récidivé et..."
G -"Depuis quand tu t'intéresses aux trafiquants de chaudrons ?!"
Boycie leva les yeux au ciel. Certaines fois, Gavin avait le don de la rendre folle.
B -"Je sais, ce n’est pas vraiment passionnant mais il ne se passe rien dans le monde magique c'est dernier temps hormis des histoires de chiens renversés ou de chaudrons trafiqués... Même l'Illusionniste n'a pas donné de ses nouvelles depuis plusieurs semaines... Je me demande ce qu'il fait..."
Boycie soupira, l'air morose. Gavin avait tressailli lorsqu'elle avait mentionné le nom de l'Illusionniste mais fort heureusement pour lui, elle n'avait pas relevé son attitude. Le jeune homme n'avait pas recommencé à voler car d'une part, il n'avait trouvé aucune trace de la cinquième pièce de collection de son père, un œuf de Fabergé qui à l'heure actuelle pouvait se trouver n'importe où dans le monde, et d'autre part, il avait été démasqué.
Son dernier vol s’était mal passé. Gavin s’était introduit chez la jeune héritière Evangeline Bathory. Malheureusement, elle l’avait découvert et avait vu son visage. Après quelques recherches, la jeune femme avait facilement trouvé qui se cachait derrière l’Illusionniste et, à la plus grande surprise de Gavin, un matin, un message l’attendait de la part de la jeune femme, lui donnant rendez-vous dans un café populaire de Londres, près de Southkensington, le quartier français en fin d’après-midi.
B – "Hey ! Gavin ! Tu m’écoutes ?!"
Gavin sortit de ses pensées et posa son regard sombre sur Boycie. Elle affichait un air inquiet qui décocha un sourire au journaliste.
B – "Donc je disais que…"
G – "Désolé Boycie mais je dois y aller !"
B – "Quoi ?! Et notre article ?? "
G – "Bah, tu arriveras bien à coincer ce trafiquant de chaudrons sans mon aide !"
En se levant, Gavin attrapa son manteau d’un geste plutôt sec. Tellement sec qu’au passage, il renversa la moitié des affaires, plumes, parchemins, bouquins, qui se trouvaient sur son bureau sur le sol. Boycie leva une nouvelle fois les yeux au ciel, exaspérée par la maladresse de son partenaire, tandis que Gavin affectait de prendre un air contrit. A la hâte, il ramassa l’ensemble de ses affaires, les reposa sur son bureau et disparut en vitesse, bousculant au passage, un de ses collègues.

Le café où Gavin devait retrouver l’héritière des Bathory se trouvait dans une ruelle adjacente de Southkensington, à proximité d’Harrods, un grand magasin. Sa devanture était faite de briques rouges et des pots de fleurs ornaient les fenêtres. Gavin trouva l’endroit étrange pour un rendez-vous mais en y réfléchissant bien, pas tant que cela. Les deux jeunes gens passeraient davantage inaperçus dans un endroit vivant et rempli de monde. Quand il pénétra dans le café, il s’aperçut qu’il s’agissait en réalité d’un salon de thé, rempli de couples ou d’amis discutant gaiement. Un coup d’œil suffit à Gavin pour s’apercevoir qu’Evangeline n’était pas encore là. Il était en avance de toute manière. Le jeune homme se sentait mal. Il appréhendait cette rencontre plus que tout mais il était aussi très intrigué. Il savait qu’Evangeline pouvait le dénoncer à tout moment, aussi il s’intéressait sur les conditions qu’elle mettrait au prix de son silence. Gavin était un simple voleur, un voleur possédant le don de l’Illusion mais il n’avait jamais tué. Le plus mauvais sort qu’il avait pu lancer à l’une de ses victimes devait être un stupéfix.
Gavin dénicha une table dans un coin, près d’une fenêtre, cet emplacement pourrait lui permettre de surveiller l’arrivée d’Evangeline. Il se cala contre le dossier de la chaise, un air grave et sérieux sur le visage.

« Les chiffres sont là Evangeline ! »
« Il y a sûrement une erreur… »
« Non ! Ils avancent, nous régressons ! »

Au souvenir de cette discussion lors de sa dernière réunion, Evangeline se mordit l’ongle du pouce pour contenir sa colère. Comment cela pouvait-il être possible ? Sa marque était bien meilleur et ses produits de qualités ! Comment une petite entreprise pouvait lui voler sa clientèle ? C’était tout simplement inadmissible ! Comme si elle n’avait pas suffisamment à faire avec Talia, voilà que d’autres se mettaient sur son chemin. Mais cela n’allait pas se passer comme ça… elle avait fouillé, elle fouillait toujours… et elle avait apprit que la petite boite préparait un défilé pour la semaine de la mode. Or sans tenue, pas de défilé ! et puisque l’événement se rapprochait et qu’elle savait que les vêtements n’étaient pas encore créés, il suffisait qu’elle fasse disparaître les croquis. Bien entendu comme tous les plans d’Evangeline, cela semblait bien plus facile qu’à faire. Autant dire qu’elle n’allait pas pouvoir les récupérer en les demandant gentiment et que Luke refuserait catégoriquement un travail où il ne devait ni torturer, ni tuer.

Qu’à cela ne tienne ! Evangeline était pleine de ressources et elle avait encore quelques cartes dans sa manche, dont une à laquelle elle pensait tout particulièrement. D’ailleurs, elle avait rendez-vous avec dans peu de temps maintenant et si elle ne voulait pas être en retard, elle devait se hâter. Elle n’allait tout de même pas faire attendre plus que de raison le grand Illusionniste ! Elle ricana à cette pensée. Qui aurait pu deviner que derrière le célèbre voleur se cachait un journaliste un peu gauche et sans intérêt ? Pas elle en tout cas ! Lors de leur rencontre, alors qu’il essayait de la voler, elle avait d’abord cherché à le retrouver pour se venger de lui, lui envoyer Luke ou un autre, car on ne dérobe pas un Bathory ! Puis lorsqu’elle l’avait retrouvé, une autre idée avait fait place dans son esprit. Un voleur de cette renommée… quel dommage de le voir finir sa carrière derrière les barreaux ! et surtout, il pouvait lui être utile !

Le trajet entre son bureau et le lieu dans lequel elle avait donné rendez-vous à l’homme fut vite fait, et tant mieux ! Elle qui était du genre impatiente, elle avait assez hâte de pouvoir revoir son voleur en se sachant cette fois, en position de force, bien que la dernière fois elle ne fut pas non plus une vraie victime. Pénétrant dans le salon de thé, elle repéra bien vite l’homme avec qui elle était venue s’entretenir. D’un pas non hésitant, elle se dirigea vers la table qu’il occupé et se délesta de sa veste avant de prendre un siège face à lui. Elle posa ses coudes sur la table, puis son menton sur ses yeux, scrutant les traits de celui qui avait essayé de s’accaparer un objet de sa propriété.

« Alors Mr. Warner… vous semblez avoir une vie particulièrement bien remplie ! Vous ne devez pas avoir le temps de vous ennuyer ! »

Son ton était tout aussi taquin que le regard qu’elle posait à présent sur lui. Elle se demanda un instant s’il allait lui répondre quelque chose ou non, puis finalement, elle décida de s’en moquer et continua d’une voix amicale mais laissant refléter la contrôle qu’elle pensait avoir de la situation.

« J’espère que vous vous rendez compte de la bonté dont j’ai fait preuve en ne vous dénoncer pas. Vous n’allez pas me le faire regretter n’est-ce pas ? »

« Alors Mr. Warner… vous semblez avoir une vie particulièrement bien remplie ! Vous ne devez pas avoir le temps de vous ennuyer !»

Gavin l’avait vu entrer dans le salon de thé. Il l’avait silencieusement observé se diriger vers lui avec calme et assurance. Elle s’était installée, avait posé ses coudes sur la table et l’avait fixé intensément. Lorsqu’elle parla, sa voix se faisait amicale mais Gavin nota la note de confiance qui en découlait. Il savait qu’elle menait le jeu et, malgré l’appréhension qu’il ressentait, il s’interrogeait sur ce qu’elle lui voulait. Elle attendait quelque chose de lui et il le savait bien. Maintenant, il devait tout faire afin de tirer son épingle du jeu sans trop de difficulté. Il lui fallait réfléchir vite et bien tout en gardant son calme et sans laisser paraître aucun sentiment de panique ou de stress. Il ne répondit pas à sa plaisanterie. Cela ne servait à rien. Il s’agissait d’une simple formalité. Gavin avait l’impression désagréable qu’elle cherchait à l’amadouer.

« J’espère que vous vous rendez compte de la bonté dont j’ai fait preuve en ne vous dénonçant pas. Vous n’allez pas me le faire regretter n’est-ce pas ? »

Chantage, chantage. Intérieurement, Gavin se montrait sarcastique : bonté ? Ou pas. L’envie de répondre avec ironie l’avait saisie mais il n’était pas en position de force et faire le malin ne lui servirait à rien. Il préférait en finir au plus vite. Aller droit au but, mettre fin au suspense et à la tension qui le tenaillait.

« On pourrait tourner autour du pot pendant encore quelques minutes mais je préférerais que nous allions droit au but… Qu’attendez-vous de moi, Mlle Bathory ? »

Direct, voilà une réponse qui lui ressemblait. Ou du moins, qui ressemblait à l’Illusionniste et non au petit journaliste maladroit et quelque peu timide que beaucoup connaissaient. Il dévisagea la jeune femme avec insistance, se demandant si elle se laisserait démonter. Mais elle paraissait tellement confiante et elle dégageait une telle aura que Gavin n’y aurait pas mis sa main à couper. Elle ne lui inspirait pas du tout confiance. Cependant, Gavin tenta de conserver son calme et de maîtriser la tension qui l’habitait. Il tenta de faire le vide dans son esprit afin de ne pas se laisser envahir par ses émotions ou quoi que ce soit d’autre qui n’aurait fait que le distraire en cet instant.

« Pourquoi avez-vous besoin de moi ? Je ne tue pas. Je ne fais pas couler le sang. Alors ? Devrais-je voler pour vous ? »

Il s’était mis à chuchoter. Installée à une table proche de la leur, un couple de curieux les observait sans aucune discrétion. Particulièrement agacé par ce sans gêne, Gavin leur jeta un regard noir. Les deux amoureux détournèrent la tête en vitesse, l’air de rien. Le journaliste reporta son attention sur Evangeline, se rapprochant légèrement.

« Et puis, si je vous rends un service, serons-nous quitte par la suite ? Oublierez-vous mon…secret ? »

Il essayait de tâter le terrain et de voir s’il pouvait parvenir à négocier avec la jeune femme. Un service rendu pour son silence ? Serait-ce suffisant ? Ou Evangeline était-elle gourmande ? A cet instant, une serveuse se dirigea vers eux afin de prendre leur commande. Gavin se redressa sur sa chaise.

« On pourrait tourner autour du pot pendant encore quelques minutes mais je préférerais que nous allions droit au but… Qu’attendez-vous de moi, Mlle Bathory ? »

Evangeline fut quelque peu déçu par cette attaque directe… Certes elle n’était elle-même pas patiente pour un sou, mais lorsque c’était elle qui menait la danse et qu’elle savait très exactement où elle allait, elle aimait jouer. Mais visiblement son interlocuteur n’était pas joueur… dommage ! Dans un autre sens, cela lui plaisait tout autant. Si Evangeline aimait avoir le bas peuple sous son joug, il lui arrivait parfois d’apprécier les téméraires, ceux possédant un réel caractère, ne se démontant point et Gavin semblait faire parti de cette tranche et ce, pour son plus grand plaisir à elle. Elle aimait trouver de la répartie et de l’audace chez certain de ses adversaires, et Gavin semblait doté des deux. Elle appréciait cela, car elle aimait d’autant plus soumettre les forts aux faibles.

« Pourquoi avez-vous besoin de moi ? Je ne tue pas. Je ne fais pas couler le sang. Alors ? Devrais-je voler pour vous ? »

Elle afficha clairement une moue boudeuse et attristée comme si il avait finalement réussi à la toucher. D’ailleurs, sous son masque de comédienne, peut être était-ce vraiment le cas.

« Je suis triste de constater que vous semblez penser de moi que je suis un monstre tuant de sang froid. Je ne pense pas donner cette image de moi pourtant. »

L’image qu’elle donnait d’elle… elle était tout autre ! Héritière ayant reçu une éducation des plus parfaites, sachant se tenir en société et ayant des relations amicales avec toutes personnes vu sa grande gentillesse. Baliverne ! C’était très certainement Gavin qui était le plus proche de la vérité avec ses propos et non tout ces gens qui se vantaient de la connaître.
Elle se permit un petit ricanement en voyant le regard noir qu’il lança au couple non loin d’eux, il n’était pas très subtil mais tout le monde ne pouvait pas posséder cette vertu après tout. Elle aller répondre à sa précédente question, mais avant qu’elle n’eu le temps d’ouvrir la bouche, Gavin s’exprima de nouveau. Son sourire s’élargie alors, elle le tenait ! elle l’avait prit dans ses filets et ne comptait pas le laisser s’en défaire. La serveuse se présenta, les interrompant tous deux dans leur échange et pourtant, le sourire d’Evangeline ne s’effaça pas le moins du monde. Ils commandèrent et lorsqu’elle fut sûre que la serveuse ne pouvait plus les entendre, elle se pencha elle aussi vers lui et susurra,

« Il me faudra plus d’un coup de main pour oublier ce fait. »

Elle savait qu’elle poussait le bouchon, mais elle le tenait, il ne pouvait rien y faire et à cette pensée, son sourire déjà bien prononcé, s’accentua.

« J’ai besoin que vous dérobiez quelques documents pour moi, des croquis pour être plus précise… »

Voilà qui devrait tout de même le rassurer ! Par rapport à ce qu’il avait l’habitude de voler, cela ne représentait rien et surtout, ça serait un jeu d’enfant d’entrer dans un immeuble à peine gardé. La serveuse revint avec leur consommation et aussitôt, le sourire d’Evangeline passa du calculateur au plus innocent et elle la remercia avec politesse. Elle repartit de nouveau et la blonde porta sa tasse à ses lèvres, buvant une gorgée avant de reposer sa tasse. Elle passa son indexe sur le contour de l’objet et lâcha, sachant pertinemment l’effet qu’elle produirait.

« Si vous acceptez maintenant, je vous donnerais ce que vous étiez venu chercher l’autre fois. »

Pourquoi tant de générosité d’un coup ? Elle avait tout à gagner et lui tout à perdre dans cette histoire, elle n’avait pas besoin de l’appâter. Oui mais voilà, rien ne lui disait qu’il ne préférerait pas prendre la poudre d’escampette et se mettre en fuite plutôt que de devoir se soumettre à quelqu’un pour un temps incertain. Evangeline aimait les choses belles et uniques, et l’Illusionniste était la pièce qu’elle voulait plus que tout dans sa collection.

« Il me faudra plus d’un coup de main pour oublier ce fait. »

Gavin se contenta de plonger ses yeux dans la tasse de café que la serveuse venait de lui apporter. Il savait qu’il avait face à lui une adversaire redoutable. Evangeline Bathory menait d’une main de fer dans un gant de velours ses affaires. D’une part, elle maîtrisait son image à la perfection. Elle savait cachait ses émotions, et jouer à la jeune femme charmante et charmeuse quand cela était nécessaire. Mais elle ne perdait jamais le nord, n’oubliant pas ce qu’elle était venu réclamer. Gavin percevait autour de la jeune femme une aura particulière qui le rendait méfiant. Peut être qu’en d’autres circonstances, le journaliste n’y aurait pas prêté attention et se serait laissé charmer par la belle, tombant ainsi dans la toile qu’elle dressait autour de chaque être qu’elle côtoyait.

« J’ai besoin que vous dérobiez quelques documents pour moi, des croquis pour être plus précise… »

Des croquis ? Gavin garda un visage impassible mais intérieurement, il se sentait presque outré qu’elle n’ait fait appel à lui que pour voler quelques croquis. Bien sûr, il ne s’agissait là que d’orgueil mal placé et en y regardant de plus près, le jeune homme était infiniment soulagé. Il se demandait maintenant qui il devait voler. Le mot croquis avait éveillé quelques réminiscences. Il savait qu’Evangeline développait de nombreuses activités dont une affaire de design ou de stylisme. Pourtant sur le marché, la véritable boutique dont tout le monde parlait était celle de Talia Almodovar. Il avait, quelques mois auparavant, fait un article sur Veela, tandis que sa collaboratrice, Boycie Jones, était une fervente admiratrice de ces vêtements.

« Si vous acceptez maintenant, je vous donnerais ce que vous étiez venu chercher l’autre fois. »

Le jeune homme marqua une pause surpris. Il ne s’attendait certainement pas à ça. Il déglutit difficilement, tout en sachant qu’il était en train de pactiser avec le diable.

« Très bien… Je le ferai à condition d’avoir votre parole concernant votre silence et l’objet. »

Il avait parlé d’une voix forte et claire, détonante quand on n’avait de Gavin la seule image d’un jeune homme timide. Mais c’était l’Illusionniste qu’Evangeline avait face à elle. Un voleur habile et talentueux. Il venait de dire à Evangeline qu’il le ferait et il ne comptait pas revenir sur sa parole. Après tout, un oui était un oui. Il ne pouvait plus faire marche arrière. Cependant il parvenait à mesurer clairement l’étendue du piège dans lequel il venait de se fourrer. Il savait qu’à tout moment, si Evangeline avait besoin de ses services, elle saurait où le trouver.
Tout autre voleur, mangemort, ou quoi que ce soit d’autre, aurait très bien pu imaginer un plan pour la mettre hors d’état de nuire, réfutant l’idée d’être « asservi ». De la part de Gavin, cela aurait été mal connaitre son adversaire et la sous-estimer. On lui avait toujours appris à ne pas trop jouer avec le feu ou du moins, dans une demi- mesure.

« Où dois-je m’introduire ? »

Pour réaliser son casse en toute discrétion, il avait besoin du plus d’informations possibles.

« Quand dois-je vous livrer les croquis ? J’ai également besoin de connaitre le système de sécurité du lieu. Si les propriétaires utilisent de la vieille magie, ce sera beaucoup plus difficile. Tout ce que vous savez ne pourra que m’aider. »

Le sourire d’Evangeline s’étira en découvrant, non sans contentement, l’effet qu’elle avait obtenu en l’appâtant ainsi. Elle savait à présent qu’elle pouvait compter sur le célèbre voleur afin de réaliser quelques basses besognes. Elle en était à présent certaine et sa réponse fit sonner en elle le glas de la victoire, de celles bien méritées. Pour toute réponse à ses conditions, elle fit un signe de la main désinvolte, concluant positivement qu’il n’avait absolument rien à craindre. Bien entendu qu’elle garderait le silence et qu’elle lui donnerait l’objet. Déjà sur le dernier point, elle ne l’aurait pas proposé si elle tenait à trahir ses propres dires, mais elle se sentait d’humeur généreuse en ce jour, sûrement parce qu’elle venait d’acquérir bien plus qu’un simple bibelot hors de prix. L’Illusionniste était mille fois plus rare et intéressant que cet objet qu’elle avait pourtant défendu avec tant de hargne lorsqu’il avait tenté de le lui dérober. Ce n’était pas tant l’objet en lui-même qui avait poussé Evangeline à agir de la sorte, il aurait très bien pu essayer de lui dérober une fourchette que cela aurait été de même. On ne vole pas un Bathory !et encore moins Evangeline. En ce qui concernait son silence, et bien… elle n’avait rien à gagner en dénonçant le journaliste, bien au contraire, et bien entendu tant qu’il serait utile et serviable, son secret serait bien gardé.

« Où dois-je m’introduire ? »

Le sourire de l’héritière s’effaça complètement, lorsqu’il s’agissait d’affaires, elle ne jouait plus. De plus, entrée ainsi dans le vif du sujet lui rappelait la dite affaire et la colère qui avait été la sienne en découvrant la croissance de cette misérable entreprise, et ce au détriment de la sienne.

« Quand dois-je vous livrer les croquis ? J’ai également besoin de connaitre le système de sécurité du lieu. Si les propriétaires utilisent de la vieille magie, ce sera beaucoup plus difficile. Tout ce que vous savez ne pourra que m’aider. »

Se faisant d’abord silencieuse, elle sortit de la poche de sa cape un morceau de parchemin soigneusement plié et le fit glisser en toute discrétion sur la table, jusqu’au jeune homme. Elle n’était pas assez stupide pour ne serait ce que prononcer le nom de l’entreprise qu’elle tentait de faire chuter, qu’on puisse simplement entendre son nom dans sa bouche pouvait entraîner petit ragot en tout genre surtout après un casse, et ces petites rumeurs prendraient ampleurs, devenant possible soupçons et accusations. Bref, Evangeline était prudente, plus que de raison parfois mais jusque là, tout ceci lui avait réussi. Bien entendu, sur le morceau de parchemin, le voleur ne lirait pas simplement un nom quelconque, mais toutes les informations utiles qu’elle avait sur l’entreprise et dont il allait avoir besoin. Elle se pencha alors et murmura doucement,

« Vous allez me vexer à force de me juger à tord et à travers… je ne suis pas novice en la matière. »

Cette petite précision faite, elle se redressa un léger sourire flottant sur ses lèvres. Se levant de son siège, elle remit sa cape de sorcier sur ses épaules, fouillant quelques secondes dans ses poches, elle laissa bien vite de quoi payer sur la table, avec un petit pourboire qui ne manquerait pas de faire plaisir à la serveuse. Elle était vraiment de bonne humeur ! et surtout, elle faisait bonne figure, se montrant non près de ses sous. D’un pas aérien, elle contourna la table pour se rendre auprès de Gavin et une fois qu’elle y fut, elle se pencha et chuchota d’un ton suave et charmeur,

« Et si nous allions continuer cette entretient dans un endroit plus privé ? Les oreilles se font indiscrètes ici… »

Pour la seconde fois depuis qu’elle était arrivée, elle avait surprit deux pairs d’yeux tournés dans leur direction et cela commençait sérieusement à l’échauffer même si elle n’en montrait rien…