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 Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE

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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 3:43



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• Eleanor Lou Henley
Dix-sept ans, Septième année




        « Here she's coming and she's drunk again ; she's only seventeen. Her daddy said "well that's enough of that come be my little queen" ; And now he's touching her wrong again. He's gonna give her disease. He never wanted it anyway, he only does as he please. Won't you tell her that I said I'm the one ? I couldn't hurt her like everyone. And tell her that I said I'm the one ; And I don't deserve her. » seether; i'm the one.


    Spoiler:


Dernière édition par Eleanor L. Henley le Sam 28 Mar - 19:33, édité 1 fois
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 3:50



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    Il y a des limites qu’on dépasse sans y penser, par simple ennui, des lignes blanches franchies avant même d’y avoir réfléchi. Des évènements qui se produisent sans qu’on y ait consenti, et soudainement, nous faisons face à une situation qui nous échappe. L’instinct. L’instinct est maître de tout, l’instinct est ce qui nous définit. Pulsions incontrôlables, désir animal. Tout se mélange, et le choix se fait brusquement, jugement posé par un esprit bien formé – mais peut-être pas assez. Et les conséquences sont toujours là, choses invisibles qui nous rappellent à l’ordre. Responsabilité. Coupable, coupable. Te souviens-tu ? Tu as tout détruit.
    Putain, tu l’as démolie, connard.



      Elle avait les yeux grands ouverts, immobile au fond du placard, son ours en peluche serré dans ses bras fins. Encore une nuit qu’elle passerait dans l’obscurité, coincée entre deux toiles d’araignée, afin d’échapper à la colère de son père. Les cris résonnaient dans son crâne de façon entêtante, si fort qu’elle avait l’impression de ressentir la douleur qu’ils exprimaient. Un coup, deux coups. Elle frissonna. Elle était lâche. Oh, tellement lâche. Elle aurait dû aider sa mère, la protéger. Mais la peur lui tordait le ventre, et la force de l’habitude l’avait poussée à aller se réfugier dans cet endroit sordide qui lui paraissait plus rassurant que sa chambre, qui était pour sa part bien trop accessible. Pourtant, elle avait senti la crise venir. Elle les sentait toujours arriver, tout comme elle voyait toujours la haine dans le regard que ses parents posaient sur elle le lendemain. Haine brûlante, vivante, prête à exploser à tout moment. Généralement, ils se contentaient de se détruire l’un l’autre, mais parfois, cela tombait sur elle. Sa tête violemment éclatée contre le coin d’une table, une cigarette négligemment écrasée dans le creux de sa paume. Elle ne se plaignait pas, elle ne criait pas, elle ne pleurait pas. Parfaite petite poupée, silencieuse et soumise. Quand elle n’arrivait plus à le supporter, elle se mordait les lèvres jusqu’à ce que la douleur soit plus forte que celle qu’elle ressentait à l’intérieur. Elle connaissait l’odeur du sang, son goût métallique, sa couleur rougeâtre qu’elle préférait confondre avec de la confiture, sa texture déplaisante au toucher. Elle connaissait par cœur l’angoisse, cette même angoisse qui l’étreignait en cet instant, la paralysant, anesthésiant tous ses sens, la réduisant au pantin sans vie et manipulable qu’elle aurait tellement aimé être. Incapable de penser, incapable de bouger, cela aurait été bien plus facile. Se laisser bercer par l’existence, ne pas devoir se battre tous les jours. Elle retenait péniblement son envie d’éclater en sanglots, étouffant son angoisse sous l’espoir qui lui avait si souvent permis de résister. Ce serait bientôt fini, bientôt fini. Il irait se coucher, sa mère viendrait la chercher, et elle irait s’allonger dans ses draps froids, attendant que les ronflements de son père percent le silence tendu pour pouvoir à son tour fermer les yeux. Mais les cris ne s’arrêtaient pas, et elle entendit bientôt la voix de sa mère s’élever, prononcer des paroles qu’elle n’avait jamais entendues auparavant.

      Lilly - S’il te plait Nathan… Eleanor, elle… Ne lui fais pas vivre ça. Je t’en supplie.

      Il éclata de rire, ce qui lui donna la nausée. Elle plaqua la main sur sa bouche pour retenir un haut-le-cœur – l’odeur commençait à se diffuser. Se balançant doucement d’avant en arrière, les yeux à présent fermés, elle s’immobilisa cependant lorsqu’un morceau de musique classique s’éleva dans la pièce d’à côté. La fillette eut un hoquet de stupeur. Tremblante, elle était alerte au moindre son, à la moindre nuance. C'était la chanson préférée de son père. La mélodie, prenante, s’insinuait lentement dans sa tête, tandis que les larmes roulaient sur ses joues livides. Elle se mordit violemment la lèvre inférieure, voulant retenir la plainte qui menaçait de s’échapper de sa bouche auparavant entrouverte. Elle voulait sortir. Crier. Le frapper, le détruire. L’empêcher de lui faire du mal. Mais elle ne pouvait pas bouger. Elle devait le faire, pourtant. Elle devait l’aider. Elle n’avait pas le choix. Dix, neuf, huit… Elle était terrifiée. Une peur sauvage, dont elle avait envie de se saisir pour l’écraser. Ecraser ce qui la retenait à l’intérieur, écraser cette faiblesse qui lui faisait honte. Dix, neuf… Maman, maman ? Et le mot résonnait dans son crâne, plus fort que la musique, plus fort que le bruit de ses pleurs. Elle perçut un cri entre deux notes, et se recroquevilla sur elle-même. Le morceau touchait à sa fin, les notes s’étirant sadiquement, semblant la narguer dans son désespoir. Et soudain, le silence fut complet. Plus de piano, plus de hurlements étouffés, plus rien. Alors, elle entendit un rire hystérique, pratiquement inhumain, et, après quelques secondes d'incrédulité, elle se rendit compte que c'était le sien. Et pendant que son père, de l'autre côté de la porte, commençait à réaliser l'ampleur de ce qu'il venait de faire, elle riait, elle riait à s'en écorcher les lèvres, elle riait jusqu'à en perdre la tête, serrant dans ses bras la peluche inanimée.


    Petite fille au regard d'ange, glisse doucement vers les enfers, et sourit, sourit. Tellement fort qu'on y croit, tellement bien qu'elle n'en doute pas. Une semaine plus tard, la première page du journal local parlait du meurtre de Lilly Henley par son propre mari, et d'une enfant placée chez la mère de ce dernier. Rien n'était jamais arrivé. Ce n'avait été qu'une illusion, cauchemar dont elle était sortie vivante. Son père fût condamné à dix ans ferme, et elle agita joyeusement la main dans sa direction lorsqu'elle le vit s'éloigner pour la dernière fois. Rien n'arrivait jamais, rien n'importait. Cinq années qui n'existaient plus. Elle s'appelait Lily désormais, et ça allait.
    Ta vie est mienne, tu es belle quand tu meurs.




Dernière édition par Eleanor L. Henley le Sam 28 Mar - 5:54, édité 1 fois
 
MessageSujet: Re: Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE   
Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 3:54



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    Menteuse. La sanction était tombée, irrévocable. Deux heures passées assise sur une chaise, dans le noir, pour réfléchir à ses bêtises. Magique, magique. Mensonges. Ce sale gosse de Dylan avait été raconter à sa grand-mère ce qu’elle lui avait confié il y a quelques semaines – parfois, il se passait des choses étranges autour d’elle. Et maintenant, elle était coincée ici, et le temps était tellement long, il s’étirait à l’infini, et elle se l’imaginait, glissant devant elle, s’échappant de ses doigts fins, la condamnant à vivre entre ces murs, dans la même position, pour l’éternité. Ruminant sa vengeance, elle murmurait des « abracadabra ! », clignait des yeux en espérant se téléporter loin de Londres. Elle haïssait cette ville, elle haïssait sa mamie. Elle s’ennuyait atrocement, dans cette école stupide. Elle détestait les mathématiques, et la conjugaison. Son ancienne vie lui manquait. Sa mère, sa maison, son père, même. Mais elle ne voulait plus le voir. Pas derrière ces affreux barreaux qui lui cachaient la vue. Alors elle hurlait à chaque fois qu’on l’obligeait à y aller, elle se débattait, pleurait, finissait par terre à supplier, ignorant les regards condescendants que les adultes lui jetaient. Puis elle se calmait subitement, se remettait debout, et riait doucement, comme si ce n’était qu’une blague, rien qu’une plaisanterie, n’est-ce pas ? Elle se maîtrisait parfaitement, elle y était habituée, vous savez. Même qu’elle arrivait à ne pas faire tomber le livre que sa grand-mère posait sur sa tête quand elle marchait. C’était tout un exercice qu’elle devait contrôler, sous peine d’être punie. Ici, les punitions ne faisaient pas mal. Jamais personne n’avait levé la main sur elle, mais c’était pire, bien pire. Contrôle mental. On lui ordonnait de réfléchir sur ses actions. Et les pensées se mélangeaient toutes, jusqu’à ce qu’elle ait l’air l’impression de devenir folle – la servante lui disait souvent qu’elle l’était. Et parfois, elle la croyait.

    Coccinelle, vole, vole ; petite Reine des bois.
    Coccinelle batifole, mais qui donc l'attend là-bas ?


    Douces ritournelles, comptines d’une autre époque, et elle chantonnait doucement, riant toute seule d’avoir un jour pensé pouvoir posséder des pouvoirs. Ce n’était pas pour elle, tout ça. Elle était banale, banale. Et elle s’en persuadait du mieux qu’elle le pouvait, et sa voix s’élevait de plus en plus, ricochant contre les dalles froides. Elle se leva d’un bond, se trébucha jusqu’à la porte, tambourinant contre cette dernière en appelant son grand-père, qui devait être en train de travailler dans la pièce à côté. Elle était prête à sortir, maintenant. Elle arrêterait de dire des idioties s’il le fallait, et si elle le pouvait, elle arrêterait de faire bouger cette photo de famille qui trônait sur la cheminée. Oh, vraiment, elle ne le faisait pas exprès. Elle n’aimait juste pas la voir là, comme ça. Comme si tout allait encore bien. Tais-toi.
    Tout allait bien.

    Richard - Arrête un peu de faire tout ce bruit, Lily. Il te reste vingt minutes, grand-mère ne sera pas contente si je te laisse partir avant.

    La voix de l’homme avait surgi soudainement, entre deux coups frappés contre le bois. La fillette rit avec enthousiasme, ravie qu’il lui réponde malgré les instructions de la mère de son père. C’était une femme sévère, à qui son mari était totalement soumis. Ainsi, il ne disait jamais rien lorsque il n’était pas d’accord, se contentant de secouer la tête d’un air désapprobateur – ce qui ne manquait jamais de l’amuser. Elle s’amusait de beaucoup de choses, sans vraiment savoir pourquoi, sans y réfléchir plus que ça. C’était comme un réflexe, ses lèvres s’étiraient à n’en plus finir, et elle parlait, parlait. Combler le vide, ce vide béant. Elle se prenait facilement d’affection pour des choses qui paraissaient sans importance aux autres, était sensible au moindre changement autour d’elle, et s’adaptait avec une aisance qui la distinguait des autres enfants de son âge. Une maturité à toute épreuve, mélangée avec une inconscience presque palpable. Elle ne voyait pas les limites. Le bien et le mal lui semblaient être deux notions étroitement liées, pour elle, tout se rejoignait. Elle éprouvait autant de plaisir à désobéir qu’à se plier aux contraintes diverses qu’on lui imposait, ça dépendait simplement de son humeur. Et après tout, si cela lui faisait plaisir, pourquoi serait-ce mal ? Non, ça ne pouvait pas l’être. Simplicité enfantine, et cette même pensée qui revenait sans cesse, formait son futur sans qu’elle n’en ait encore conscience : rien n’était grave.

    Eleanor - De toute façon, elle n’est jamais contente.

    Ton boudeur, insolence irréfléchie, elle ne pensait pas à ce qu’elle disait, ne contrôlait rien, ne songeait même pas à le faire. Les mots s’envolaient avant qu’elle n’en prenne conscience, parce qu’elle ne voulait pas s’attarder sur eux. Ce n’était que des paroles, elle ne leur faisait pas confiance, elles étaient si facilement déformées, détournées contre elle-même. Elles étaient parfois tranchantes, menaçantes, planant au-dessus de sa tête comme une promesse de souffrance imminente. Alors, au lieu de tenter de les maîtriser, elle les laissait vivre à sa place, occuper tout l’espace. Elle renonçait devant l’obstacle, fermait les yeux devant la difficulté, et cette même rengaine, encore et toujours. Rien n’est grave. Ecarts de conduite, indisciplinée, tour à tour angélique et pleine de malices, elle prenait parfois plaisir à faire mal. Et, tout en faisant semblant de se plier, elle ne rompait jamais totalement, s’agrippant avec une ténacité féroce, sûre de son droit. Son droit d’exister, de se faire entendre, que ça plaise ou non, que ça soit correct ou terriblement déplacé.

    Et dans ce cas-ci, ça l’était.

    Richard - Si elle entendait ça, tu resterais deux heures supplémentaires, tu le sais, n’est-ce pas ? Et tu sais aussi que je devrais lui dire que tu as eu de très vilaines pensées à son égard.

    Soupir. Toujours cette foutue morale. Impatience, cette envie de liberté qui lui tordait le ventre, l'empêchant de réfléchir correctement, de trouver les mots qui le feraient plier. Tant pis. Creuse, creuse, jusqu'à ce que la surface disparaisse entièrement, cette satanée bienséance qui ne lui plaisait définitivement pas.

    Eleanor - Mais tu le feras même pas, parce que tu as peur qu’elle s’énerve sur toi.

    Silence. Puis, le rire las de son grand-père, et le verrou qu’on tourne lentement, dernière hésitation, lumière, oxygène. Un large sourire se dessina sur ses traits qui ressemblaient tant à ceux de son père, et elle courut dans les bras de son sauveur qui la souleva tant bien que mal pour la faire tourner dans les airs avant de la reposer, la regardant à présent d’un air songeur.

    Richard - Tu me fais penser à Lilly. Ta mère, bien sûr. Ta grand-mère refuse que tu lui ressembles, tu sais ce qu’elle pensait d’elle. Mais je crois pouvoir affirmer que c’est une bonne chose. Ta mère savait vivre, elle. Elle savait profiter, malgré tout le reste. Je n’ai jamais su le faire. Alors saisis ta chance. Dylan t’attend depuis une heure pour s’excuser et jouer avec toi. Va le rejoindre, d’accord ? Et ne t’accroche pas trop à cette idée de magie. Tu risquerais d’être déçue, petite puce, et je détesterais te voir pleurer. Il n’y a rien d’autre que la réalité, par ici.

    Réalité. Un mot douloureux, qui la fit grimacer. Puis, elle haussa les épaules. La réalité, elle la modelait. Elle la modèlerait à sa guise, et ils n'auraient qu'à se plier à son bon vouloir. Elle rit, encore une fois, puis s'éloigna en courant à toutes jambes. Oui, elle maîtriserait tout. La réalité, c'était pour les perdants. Elle, elle vivrait dans le rêve, entraînant tout avec elle.


Dernière édition par Eleanor L. Henley le Sam 28 Mar - 7:13, édité 1 fois
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 7:12



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    Les rayons du soleil s’infiltraient par vagues par la fenêtre de sa chambre et, assise en tailleur sur son lit, elle plissait les yeux, grimaçant, le regard posé sur son camarade. Dylan, nullement gêné par l’éclat de lumière qui réchauffait la pièce, était installé à ses côtés et semblait être en pleine explication du soi-disant génie de sa nouvelle invention, un rouleau de papier toilette qui ferait aussi office de moyen de communication entre leurs deux maisons. Sans écouter la moindre de ses paroles, elle paraissait cependant fascinée par ce qu’il disait. Le jeune garçon, orgueilleux, s’en voyait tellement flatté qu’il en rajoutait des tonnes, glissant des détails auxquels il n’avait pas pensé plus tôt, allant même jusqu’à imaginer comment construire une échelle entièrement constituée de rouleaux de papier toilette – c’est qu’on est un peu con, à neuf ans. Passionné par sa découverte, il s’animait, son visage s’illuminait, ses mots s’enchaînaient les uns à la suite des autres, poussés par une force qu’Eleanor ne semblait pas saisir. Ses phrases n’étaient pour elle qu’un charabia sans fin, des sottises qu’elle ne voulait même pas prendre la peine d’écouter. Elle adressa cependant à son ami un large sourire, feignant un enthousiasme qu’elle ne ressentait pas. Puis elle attendit sagement qu’il termine son discours, et, avec un espoir un peu naïf, qu’il se rende compte des bêtises qu’il sortait. Malheureusement, la réalité était toute autre, et, au lieu de comprendre qu’il avait l’air d’un idiot, il s’embourbait dans des théories qu’il ne parvenait pas à expliquer. Elle s’en amusait, avec cette lueur cruelle au fond de ses prunelles bleues qu’elle ne cherchait même pas à dissimuler. Sa stupidité la distrayait, peut-être était-ce pour ça qu’elle l’appréciait, malgré sa lenteur, son immaturité, ses centres d’intérêt minables et sa fâcheuse tendance à aller répéter tout ce qu’elle faisait à sa grand-mère. Elle le supportait jour après jour, tout comme elle supportait cette existence sans saveur qu’elle semblait être condamnée à mener jusqu’à la fin de sa vie. Alors elle tentait de se divertir, par tout les moyens, et le voir se ridiculiser était ma foi une de ses occupations préférées.

    Dylan – Alors tu vois, tu vois, imagine que… Ben on aurait qu’à les coller tous ensemble, tu vois, et puis après…
    Eleanor – Et puis après, on pourrait faire quelque chose de plus drôle ? coupa-t-elle d’une voix enjouée.

    L’enfant lui jeta un regard blessé, et elle lui accorda une moue vaguement désolée, avant de se mettre debout, le toisant d’un regard provocant. Oh, elle savait qu’elle n’avait pas le droit d’être debout sur son lit, et elle savait qu’il se ferait un plaisir de le glisser à sa grand-mère en partant, mais elle n’en avait que faire. Il était si terriblement obsédé par les règles qu’ils se devaient de respecter qu’il semblait oublier ce qui était intéressant à faire. Heureusement, la fillette était là pour lui rappeler, et, lui tendant la main de l’air autoritaire de celle qui s’apprête à sévir si on lui désobéit, elle songeait déjà à ce qu’elle allait bien pouvoir l’obliger à faire. Après une hésitation, il mêla ses doigts aux siens et se hissa à ses côtés, ses yeux brillant d’un air inquiet, sachant pertinemment que les idées d’Eleanor Henley incluaient rarement de simples rouleaux de papier toilette. Le tirant avec elle, cette dernière sauta d’un bond de son lit et se retourna vers lui avec un sourire qui, de son point de vue, ne présageait rien de bon.

    Eleanor – On joue à cap’ ou pas cap’ ? demanda-t-elle, les yeux pétillants.

    Si son intonation laissait penser que sa phrase était une question, son regard lui, semblait dire tout le contraire. Dylan, de moins en moins rassuré, plissa les yeux – peut-être était-il à son tour incommodé par la lumière du soleil, qui sait ? Il s’apprêta à protester, juste pour la forme, sachant qu’il ne lui tiendrait pas tête longtemps, mais elle se précipitait déjà vers la porte de sa chambre pour la fermer. Il poussa donc un long soupir et haussa les épaules, vaincu.

    Dylan – S’tu veux. Mais pas longtemps hein, on m’attend pour le dîner, alors tu vois, je peux pas rester longtemps, parce qu’après ils vont manger sans moi, et maman…

    Il se mordit aussitôt la lèvre, mal à l’aise à l’idée d’avoir fait mention de sa mère. Bien qu’elle ne réagisse jamais, il évitait toujours au maximum d’en parler, craignant qu’elle finisse par craquer et ne commence à pleurer. Il ne supportait pas voir les filles pleurer, ça lui faisait peur. D’un autre côté, d’eux deux, il était le seul à avoir laissé les larmes s’échapper et rouler sur ses joues livides, le jour où Ely lui avait fait un croche-pied, afin de tester son équilibre – du moins, c’était ce qu’elle avait expliqué par la suite à ses grands-parents, avec l’air innocent du nouveau né, ce même air qui lui avait épargné bien des punitions. Aujourd’hui, cependant, elle essayait de moins en moins de se faire pardonner de ses bêtises diverses, semblant même apprécier certains de ses châtiments. Enfin, elle était bizarre, et ça faisait longtemps qu’il avait cessé d’essayer de la comprendre, elle et ses rires soudains.

    Eleanor – Oui, oui, on t’attend pour manger, rétorqua-t-elle avec impatience. Sa voix s’adoucit cependant légèrement tandis qu’elle poursuivait. Je commence ? Allez… Tu te souviens de ce que tu m’as dit ? Que tu pouvais tenir sans respirer pendant deux minutes ? Eh ben, t’es pas cap de me le montrer.

    Et elle gloussa légèrement, ravie de son idée. Mortifié, Dylan pâlit soudainement. Il était réputé pour se vanter beaucoup, et ne pas faire grand-chose, et son amie le savait. Elle savait aussi qu’il s’étouffait après quelques secondes lorsqu’il était privé d’oxygène, pour l’avoir vu essayer de nager sous l’eau – un bel échec, et, comme elle aimait le souligner avec son sourire serein, il ne semblait vraiment être bon à rien. Alors pourquoi tentait-elle de le provoquer ? Il déglutit, et croisa le regard d’Ely, qui semblait jubiler à l’idée de le voir s’écraser et refuser. Mais il ne voulait pas de ça. Elle gagnait à chaque fois, par n’importe quel moyen, elle finissait par gagner, et elle en plaisantait toujours avec une bienveillance feinte. Cela faisait longtemps qu’il avait compris qu’elle n’était pas quelqu’un de bien, et selon lui, ce n’était qu’une question de temps avant que d’autres s’en rendre compte. Elle était cruelle, elle les pousserait tous dans leurs propres retranchements, et les exécuterait s’ils refusaient de se plier à ses exigences. Mais pas cette fois. Cette fois-ci, il allait lui montrer, il allait tenir ces deux putains de minutes.

    Dylan – D’accord.

    La jeune enfant eut un large sourire suite à ces paroles, et, ayant du mal à retenir son excitation, elle sautilla sur place durant quelques secondes, avant de brusquement changer d’humeur, abordant à présent un air sérieux. Elle le jaugea, puis haussa les épaules, semblant effacer une réflexion qu’elle se serait faite mentalement. Puis, elle croisa les bras sans répondre, attendant manifestement qu’il commence. Dylan sentit un nœud se former dans le creux de son ventre, pas par peur – après tout, que pouvait-il lui arriver ? – mais tout simplement car il savait qu’il ne tiendrait jamais si longtemps, et qu’elle allait se moquer de lui pendant des semaines après ça. Sentant ses jambes trembler, il crut préférable de retourner sur s’asseoir sur le lit, et, après avoir pris une grande inspiration, bloqua soudainement sa respiration, fermant les yeux pour ne pas avoir à affronter les émotions qui passeraient sur le visage de Lily. Cette dernière jeta un coup d’œil rapide à l’heure s’affichant sur son réveil, puis reporta son attention sur le garçon, qui semblait déjà avoir quelques difficultés à ne pas respirer. Elle poussa un soupir, profondément agacée, et s’approcha rapidement de lui.

    Eleanor – Je vais t’aider, sinon tu vas encore tout gâcher.

    Et elle plaqua une main ferme sur le visage de son ami. Celui-ci ne sembla pas s’en offusquer, vu qu’il ne réagit pas. Et les secondes passèrent, se succédant avec une lenteur infernale pour l’un, et délectable pour l’autre. Dylan sembla essayer de se reculer après un moment, mais la poigne de la fillette l’en interdit, emprisonnant davantage sa tête entre ses paumes. Paniqué, il tenta de se débattre, mais elle ne bougea pas. Il ouvrit les yeux, tentant de lui faire comprendre qu’il avait besoin d’air. Leurs regards se croisèrent, et pendant une seconde, ils eurent chacun tout le loisir d’observer l’éclat brillant dans les prunelles de l’autre. La panique semblait vivre dans celles du garçon, s’animant, dansant dans l’ombre de ses yeux noirs. Un fin sourire se dessina sur le visage d’Eleanor tandis que ses yeux pétillaient, apparemment enthousiasmée par cette nouvelle expérience qu’elle n’avait encore jamais tentée. L’enfant se débattit davantage, et un léger son étranglé s’échappa de sa bouche, toujours prisonnière de la main gauche de sa partenaire de jeu. Cette dernière consentit enfin à relâcher sa poigne, et elle observa avec un air curieux Dylan se plier en deux, pris d’une quinte de toux, les yeux exorbités et remplis de larmes.

    Eleanor – T’as pas tenu les deux minutes. T’es vraiment trop nul.

    Et elle se dirigea vers la sortie de sa chambre à grandes enjambées, ignorant les sanglots étouffés de son ami.
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 7:16



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    Lysandre - Eleanor, occupe-toi un peu de ton chat ! Tu nous as fait un caprice incroyable dans le magasin, et tu ne le regardes déjà plus. Tu ne lui as même pas donné un nom.

    Lui jetant à peine un regard, elle passa à côté de sa grand-mère pour prendre sa chatte dans les bras, et fourra son nez dans ses poils noirs. Effectivement, elle s’était déjà quelque peu lassée de sa nouvelle acquisition, mais ne voulait pas l’admettre devant la vieille femme. Elle se retourna donc vers cette dernière, et elle lui adressa un sourire éblouissant, chargé d’arrogance qu’elle ne cherchait même plus à camoufler. Cela faisait longtemps qu’elle avait cessé de jouer à la petite fille parfaite, longtemps qu’elle s’était éloignée du modèle sur mesure qu’on lui avait imposé.

    Eleanor - Si, elle s’appelle Caprice.

    Savourant l’indignation qui se peignait sur le visage de son interlocutrice, elle ne put retenir à temps un léger gloussement, tandis qu’elle laissait l’animal partir en courant à travers la pièce. Caprice, caprice. Rien que des caprices. Son rire prit de l’ampleur en l’entendant marmonner entre ses dents. Mamie, mamie, tu perds déjà la tête, à ton âge ? Dis-moi, tu as pris tes médicaments, aujourd’hui ? S’élançant vers la table basse posée au milieu du salon, elle se saisit une nouvelle fois de cette merveilleuse enveloppe qu’elle avait reçue quelques temps auparavant – et ne cessait de relire depuis.

    Lysandre - Arrête donc de remuer ainsi, tu me fatigues. Oh, tu es tellement épuisante. Heureusement que tu pars dans cette soi-disant école. Après l’arrestation de ton père, on aurait dû te mettre dans un foyer. Mieux, on n’aurait jamais dû l’arrêter. Ce n’était qu’une regrettable erreur, mais bien sûr, ils n’ont rien voulu entendre, et voilà où on en est ! Et ta mère, ta mère… Est-ce d’elle que tu tiens cette… cette… Chose ? Est-ce donc héréditaire ? – mon Dieu, pourquoi est-ce que je te le demande ? Tu ne sais rien évidemment, pauvre petite chose que tu es. J’espère qu’ils t’éduqueront, car je ne peux plus le faire. Ton grand-père est souffrant, et tu n’arranges rien. J’ai pourtant essayé… ELEANOR, LE CHAT VIENT DE CASSER MON VASE ! Eleanor, tu m’écoutes ? Tu es infernale. Cesse donc de relire cette fichue lettre ! Eleanor !

    Et nous espérons vous voir ce premier septembre dans le train en partance pour Poudlard, avec toutes vos fournitures scolaires. Premier septembre. Bientôt, bientôt. Elle avait toujours eu raison. Et elle n’écoutait plus, elle n’avait peut-être jamais écouté. Les mots passaient au-dessus de sa tête, elle se complaisait dans cet égoïsme qu’elle avait acquis au cours des six années passées dans cette maison. Mais c’était fini. La réalité, c’était Poudlard. La réalité l’attendait demain, et sa grand-mère pouvait toujours parler, elle n’entendait pas. C’était un autre monde. A vrai dire, elle ne savait pas si elle tenait ça de sa mère, ou si c’était juste quelque chose qui ne lui appartenait qu’à elle. Mais qu’est-ce que cela pouvait bien faire ? Cela n’avait aucune importance. On lui donnait une seconde chance, qu’elle n’hésiterait pas à saisir.

    Eleanor - Je vais me coucher. N’oublie pas, demain, je vais à Poudlard. J’ai préparé mes bagages, il faudra partir tôt, je n’ai pas vraiment compris cette histoire de voie… Enfin. N’oublie pas, tu veux ? Ce serait dommage de devoir me supporter une année supplémentaire.

    Et elle s’éloigna, guillerette, laissant la vieille femme s’acharner sur un passé qu’elle n’avait pas vécu, émettre un jugement sur quelque chose qu’elle n’avait pas vu. Ressentir. Lily oubliait parfois ce que ça faisait, les mots de sa grand-mère ne l’avait plus blessée depuis longtemps – l’avaient-ils réellement fait un jour ? Elle était détachée, elle l’avait toujours été, elle était ce qu’ils n’étaient pas, sans pouvoir l’expliquer. Il n’y avait pas de mal, il n’y avait pas de bien. La vérité n’était que mensonge, et tout pouvait être modifié à volonté. Peut-être était-ce cette façon de penser qui l’avait toujours épargnée. Ou peut-être était-ce cette façon de penser qui la fit pleurer quand elle éteignit la lumière de sa chambre avant de s’allonger.

    Demain, son avenir l’attendrait. Et elle ne savait pas si elle était déjà prête à vivre.
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:29



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    Je m'appelle Eleanor Lou Henley, souvent appelée Lily, voire Lou, et aujourd'hui, mon père a été relâché pour bonne conduite. Bonne conduite. Je trouve ça ironique qu'il soit libre le jour de mes treize ans, cela m'amuserait presque. Presque, si je n'étais pas priée de retourner vivre à ses côtés. Aujourd'hui, j'ai treize ans. Cela fait huit ans. Presque une décennie. Elle passe vite, et je me rappelle encore de ce que je pensais, ce soir-là. Je me rappelle de tout, à dire vrai, je n'ai pas eu la chance de tout oublier de mon enfance, et les évènements, marqués au fer rouge sur ma peau, me reviennent par vagues. Je jongle entre ma vie à Poudlard, mes cours, mes lettres à mon grand-père, les vacances passées chez des amis ou au collège. Je jongle, je jongle tellement, que parfois, je laisse s'échapper une balle, et je la regarde rouler, s'éloigner. On fait tous des erreurs, n'est-ce pas ? Je ne sais plus qui je suis. Peut-on se perdre dans sa propre existence ?

    Je suis lasse. Je ne lui en veux même pas. Il m'a d'ailleurs fallu longtemps pour me rendre compte de la gravité de ce qu'il avait fait. De ce qu'il nous avait fait, de ce qu'il avait brisé. Mais je n'arrive pas à lui en vouloir. Je ne suis pas mieux que lui, au fond. Son sang coule dans mes veines, et tout comme il a enlevé la vie à ma mère, il m'a donné la mienne. Maître du jeu. N'avons-nous donc été que ses pions ? Je pense trop, comme Holly passe son temps à me le faire remarquer. Au moins, je pense. Elle me dit insensible, mon détachement l'amuse, la dégoûte parfois. Je regarde l'horreur droit dans les yeux et ne frissonne même pas. M'a-t-il arraché le coeur ? Je sais qu'il y a un problème, quelque part. Je me rappelle de tout, mais ce n'est pas moi. Je n'étais pas dans ce placard cette nuit-là, car je ne le ressens pas.

    Tout va bien. Les angoisses ne sont que mensonges. Il suffit de fermer les yeux, de respirer. Interdit de pleurer. Je ne sais plus si on me l'a imposé, ou si c'est quelque chose que j'ai instauré de moi-même. Peut-on dire qu'une enfant de cinq ans avait la maturité suffisante pour prendre cette décision ? Après tout, je l'ai eue pour ne pas pleurer à l'enterrement. Pour ne pleurer que deux fois par la suite en y repensant. Pour m'éloigner, pour rire, pour me plier, rentrer dans la norme, jusqu'à exploser. Et maintenant, je suis ici, et je ne sais pas. Je le reverrai dans deux jours, je vivrai à nouveau avec lui. Et je ne sais pas, je ne sais rien, mon esprit est vide. La peur m'agrippe quelques secondes, puis s'en va, les émotions ne restent pas.

    Automatisme. Parfois, j'ai l'impression d'être folle. D'avoir imaginé tout ça, que Poudlard n'existe pas, que je suis en fait au fond d'une chambre aux murs blancs, boostée aux médicaments. J'ai treize ans, et j'ai l'impression d'en avoir cent. Je ne m'arrête jamais. De tourner, de rire, de parler, de blesser. Je suis une garce qui ne l'a pas choisi, et je souris pour me faire pardonner de maladresses qui ne sont pourtant pas tolérées.

    Je ne maîtrise rien. Je ne vois rien, je ne sens rien. Je ne suis rien. Rien de plus qu'il y a huit ans. Je n'ai pas évolué. Aujourd'hui encore, je ferai tout pareil. Je me précipiterai dans ce foutu placard, et j'y attendrai de crever. Et j'y crèverai, encore et encore, de ne pas avoir su bouger.

    Alors, au fond, je n'ai qu'une question : c'est ça, la réalité ?

    Je veux juste ressentir quelque chose.
 
MessageSujet: Re: Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE   
Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:30



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    Elle renversa la tête en arrière, poussant un soupir à fendre l’âme. Sa grand-mère avait eu l’idée de donner une réception en l’honneur de son père, tout récemment sorti de prison. Bien que peu enthousiasmée par l’idée de célébrer un évènement aussi dénué d’intérêt que celui-ci, elle avait été obligée de s’y rendre – tout d’abord parce que Lysandre Henley l’avait exigé, et ensuite parce que, à la fin de cette soirée, elle rentrerait pour la première fois de sa vie aux côtés de l’homme qui avait tué sa mère, et passerait le reste de ses vacances chez lui. Chez eux. Chez elle. Par Merlin, elle allait habiter avec lui. La jeune fille passa une main nerveuse dans ses cheveux blonds, pinçant les lèvres et s’ordonnant de respirer calmement. Elle n’avait aucune envie de déménager, aucune envie de contempler son visage durci par les années jour après jour jusqu’à la rentrée. Elle l’observait de loin, et se demandait si c’était le même homme qui l’avait élevée pendant cinq ans, si c’était celui qui avait levé la main sur Lilly, encore et encore jusqu’à ce qu’elle succombe sous les coups, si c’était lui, encore, qui avait pleuré devant elle lorsqu’elle avait finalement décidé de sortir de ce putain de placard. Elle ne le reconnaissait pas, et sous yeux évoluait un inconnu, un étranger coincé, avec le même sourire figé qu’elle se surprenait à aborder ce soir, tandis que l’ennui la dévorait, surpassant cette angoisse immonde qui faisait pourtant son chemin en elle. Elle avait froid, elle avait peur, et pour la première fois depuis longtemps, elle avait envie de se blottir dans son lit pour y déverser des torrents de larmes. Elle se l’interdit cependant et se leva, adressant un signe de tête aux convives. L’ambiance était lourde, et tous la dévisageaient avec une curiosité qu’ils n’arrivaient pas à camoufler. Ils s’attendaient à ce qu’elle craque, à ce qu’elle se jette sur son père comme elle s’était déjà jetée sur tant d’innocents auparavant, en proie à une rage qu’elle ne semblait pas pouvoir maîtriser. Mais elle n’y songeait même pas, à vrai dire. Ses pensées s’entassaient les unes sur les autres, l’empêchant d’en formuler une de façon plus cohérente, l’obligeant ainsi à se comporter normalement. Elle avait envie de rire, soudainement. Une envie irrépressible, sous tous ces regards gênés, sous tous ces murmures inquiets. Les invités ne savaient pas où se mettre, ils ressentaient la honte qu’elle aurait dû ressentir face à Nathan, et cela l’amusait particulièrement. Elle savait ce qu’ils pensaient, ce que certains osaient même dire à haute voix, pas devant elle toutefois. L’enfant d’un tueur, avec cet air impassible lorsqu’on faisait mention de sa défunte mère, l’enfant d’un tueur pouvait-il vraiment être quelqu’un d’équilibré ? Et la question s’insinuait dans son crâne, étouffant l’angoisse et le doute qu’elle ressentait quelques secondes auparavant. Elle prenait toute la place, tant et si bien que, réalisant l’absurde de la situation, Eleanor finit par éclater de rire, en plein milieu du salon, tandis que l’horreur prenait place dans les prunelles des gens qui l’entouraient. Une simple ouverture. Une faille, une légère faille qui la précipita bientôt à terre, ses sanglots se mêlant à son rire à présent hystérique. Elle n’avait pas la force de se redresser, elle ne savait pas pourquoi elle pleurait, elle ne savait plus ce qui la faisait rire, son cerveau semblait s’être éteint au moment même où ses genoux avaient heurté le sol dans un craquement. Le temps s’était figé, les murmures soudainement stoppés, mais les regards étaient plus insistants que jamais, sans que personne ne fasse un pas vers elle, craignant probablement d’être confronté à la folie dansant dans ses prunelles bleues. Pourtant, au bout de quelques secondes, quelques minutes peut-être, elle n’aurait su le dire, une main ferme se saisit de son bras, la redressant sans ménagement. Hoquetant, tremblant, elle se laissa traîner à l’écart, vaguement consciente que l’homme qui la tirait derrière lui n’était autre que celui qui était à l’origine de son état déplorable. Poussée à l’intérieur d’une pièce sombre, elle entendit le bruit d’une porte qu’on claque, et se retourna pour se retrouver face à son père.

    Nathan – Tu ne savais donc pas tenter de faire bonne impression ? Ta grand-mère a fait beaucoup d’efforts pour que cette fête soit réussie, et tu gâches tout avec tes… délires.

    Ce fut la première phrase qu’il lui adressa. La première depuis la dernière fois qu’elle était allée le voir, la première depuis qu’elle avait décidé qu’il n’était pas utile de garder contact avec lui. La jeune fille le fixa pendant quelques secondes, et son rire reprit de plus belle, jusqu’à ce qu’une main s’abatte violemment sur sa joue. Surprise, elle ne put s’empêcher de sourire doucement, consciente que la situation ressemblait à beaucoup d’autres scènes qu’ils avaient joué ensemble durant son enfance. Elle et son insouciance, lui et sa dureté. Entre eux deux, sa mère, douce mais glissant parfois dans les extrêmes que côtoyaient en permanence Nathan. Au fond, elle n’était pas beaucoup mieux. Ses colères, plus froides, blessaient l’âme plus que le corps, et laissaient des traces qui, huit ans après, ne s’étaient toujours pas effacées.

    Eleanor – Je ne vois pas comment cette fête pourrait être réussie. Sauf ton respect, grand-mère essaie tout de même de fêter la libération d’un meurtrier. Quelle personne, saine d’esprit bien sûr, pourrait se réjouir de ça, vraiment ?

    Une deuxième gifle, plus forte que la première, et son léger gloussement. Elle savourait la douleur, la morsure brûlante qui imprégnait sa joue, elle s’amusait d’une colère qu’elle était la seule à pouvoir provoquer. Les souvenirs revenaient par vagues et, au lieu de tenter d’y échapper, elle souhaitait s’y plonger entièrement, confronter la souffrance, s’en saisir, non pas pour l’écraser, mais pour la chérir. C’était dans la violence que son mal-être nauséeux semblait trouver sa place, c’était dans l’horreur qu’elle parvenait enfin à ressentir un semblant de sentiment. Leurs regards se croisèrent, et dans les yeux de son père, elle lut les remords qu’il n’avait jamais formulés, et qu’il ne formulerait probablement jamais. Un large sourire se dessina sur ses lèvres, et elle pencha la tête sur le côté.

    Eleanor – C’est quand même dommage que tu n’aies pas réussi à tourner la page, papa. Tu passerais presque pour une victime. Presque, si le sang ne tâchait pas encore tes doigts, tant d’années après.

    Et elle lui adressa une moue narquoise, tournant les talons pour s’en aller, laissant derrière elle un homme mortifié. Là où elle aurait dû plier, elle triomphait. Là où elle aurait dû s’écrouler, elle dominait, encore et encore, elle semblait s’en moquer, tellement détachée qu’elle oubliait parfois que ce n’était pas le cas de ceux qui l’entouraient.
 
MessageSujet: Re: Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE   
Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:32



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    Regarde-toi, tu me fais pitié. Encore une nuit de beuverie, regarde-toi, par Merlin, tu ne vis que pour ouvrir cette bouteille, et puis cette autre, et encore une autre, et je ramasse tes bêtises, tous les soirs, et quand ce n’est pas moi, c’est grand-mère. Tu m’écoutes ? Non, bien sûr, tu ne m’écoutes pas. Tu n’écoutes jamais rien, tu ne m’as pas entendue monter les escaliers avec ton meilleur ami non plus, n’est-ce pas ? Tu sais qu’il est à peine plus jeune que toi. J’aurais pu l’appeler papa, s’il ne m’avait pas touchée comme ça. Tu es pitoyable, moi aussi. On se mérite, au fond. Et maman le savait, et tu le savais. Hier soir, c’était mon anniversaire. Tu ne t’en es pas souvenu, l’année dernière non plus, ne t’en fais pas, ce n’est pas grave. Je n’aime ni l’idée de vieillir, ni les cadeaux, de toute façon. --

    Ramasser les morceaux de verres brisés, ranger tout avant qu’il ne se réveille, avant qu’il ne se rappelle. Il préfère faire comme si cela n’était pas arrivé, comme s’il ne me voyait pas participer à ses soirées glauques en compagnie d’hommes et de femmes de dix, vingt ans mes aînés. J’évolue avec aisance, j’ai l’habitude, je fais partie de la bande. Mes sarcasmes amusent, mon sale caractère et ma descente facile fascinent. J’ai ça dans le sang, regardez mon père, bon sang. C’est la troisième année que je passe à ses côtés, je me suis rapidement adaptée. Tout s’est mis en place sans que j’y réfléchisse. La première semaine était difficile, puis il m’a demandé de l’appeler par son prénom. Les barrières sont tombées, les disputes ont fusé. La violence ne se retrouvait pourtant plus dans ses propos, et la plus dangereuse des deux, c’était moi, moi et ma rage qui éclatait si brusquement, qui le faisait rire, et il m’entraînait dans son fou rire, et on avait l’air de deux malades. Grand-mère choisissait souvent ce moment pour arriver, et m’en voulait de l’influencer. L’influencer. Je prends du recul, et je sais, je sais que rien de tout ça n’est normal. Mais je m’épanouis. Assurance. Je ressens, je vis, je vis même pour lui. Il passe son temps à payer, encore et encore, payer pour ce qu’il a fait. Il ne s’est jamais excusé, mais ses yeux n’ont jamais menti non plus. Je n’en ai jamais parlé. Tabou. On vit bien sans, ces deux mois passés ici sont toujours pleins de sensations, et c’est peut-être pour ça que je les aime tellement. La haine que j’ai ressentie en le revoyant m’a tellement étourdie, m’a tellement aveuglée, je n’ai pas pu m’empêcher de m’y agripper. Elan de vie, j’étais humaine. Je suis humaine, et je ne le sens jamais plus que lorsque je suis ici, allongée sur mon lit, repensant à ma soirée. Il n’y a que lui pour ressentir les regrets, que lui pour me regarder d’un air apitoyé en me voyant virevolter dans la maison. Mon bonheur le détruit, et ça m’amuse. Il ne peut supporter l’idée d’être la cause de ma résurrection, il ne peut supporter que je sois celle qui m’occupe de lui. Il est le père, la figure forte, et il est écroulé dans le canapé, et il n’en sortira pas avant deux-trois heures. Il résistera quelques temps, puis se dirigera vers le frigo pour prendre une bière. Me regardera, hésitera, m’en proposera une. Et je refuserai en riant, ce qui l’irritera. Et tout recommencera.

    La fin de l’été approche. J’ai réussi à me concentrer quelques temps sur mes devoirs de vacances, mais je n’ai toujours pas fini. Il faudrait que je me presse – mon père devient invivable les jours précédant mon départ, tellement invivable qu’on passe notre temps à nous disputer. Il n’accepte pas toute cette connerie de sorcellerie, selon ses propres mots, voudrait que je reste ici toute l’année. Parfois, je me dis la même chose. Plonger dans cette existence, embrasser le mal-être dans lequel il se vautre sans complexe. Mais j’ai des choses à faire. Je ne sais pas encore quoi, je sais juste que je ne resterai pas toute ma vie à m’approprier ses maux pour me sentir vivre. Je me demande souvent pourquoi je ne peux évoluer tranquillement que dans la douleur, mais les réponses me déplaisent toutes, alors j’évite d’y réfléchir. J’ai d’autres choses sur lesquelles me recentrer. Mon avenir, tout d’abord. L’ambition est devenue au fil des années le substitut des sentiments que je peinais à ressentir. Je ne sais pas ce que je veux devenir. Je sais cependant que je veux réussir. Mieux que les autres, si cela est possible. Alors je travaille, à Poudlard, je ne fais presque que ça. Je me suis peu à peu fermée aux autres, qui me trouvent à présent désagréable. Les réflexions acérées qui paraissaient mignonnes quand j’avais douze ans semblent avoir fini par blesser leur fierté. Je n’ai plus que quelques proches, et je m’en accommode très bien. Le sens des priorités. Il faut bien que j’en aie, je ne souhaite pas finir ma vie comme lui. Pour le moment, bien sûr, je l’envie. Mais si cette existence est désirable à seize ans, à quarante, elle paraît bien plus déplorable. Je m’en sortirai. De nouveau, je ne sais pas trop ce dans quoi je suis coincée, mais je n’ai que cette solution-là. Réussir.

    Nathan - Lou ? Lou ma puce, tu ne voudrais pas aller me racheter à boire ? Ces satanés avocats m’ont vidé le frigo.

    Bonjour à toi aussi, papa. Tu sais, il n’y avait déjà plus rien hier soir, ils ont tous apporté ce qu’il fallait. Et puis, ce n’était pas des avocats. Ce ne sont jamais des avocats. Tu ne connais pas d’avocats, à part le tien. D’ailleurs, il a appelé récemment, il faudrait que tu te trouves un job, tu sais, pour qu’ils voient que tu t’es bien réintégré à la vie sociale comme il fallait que tu le fasses. En parlant de ça, tu as encore loupé ton entretien, la semaine dernière, je n’ai pas osé te le dire avant. Je sais que j’étais censée te rappeler d’y aller, mais tu n’aurais jamais décroché le boulot dans cet état… Tu devrais peut-être simplement accepter de travailler pour grand-mère, au point où tu en es, la fierté n’est plus une excuse. --

    Eleanor - Evidemment, je pensais y aller, de toute façon. Tu veux quoi ? Tu as bien dormi ?

    La réalité ne se décrit pas, ne se pense pas. Elle se vit, à coup de mots, de ressentis, de souvenirs. Il n'y a pas de solution miracle. Le mensonge sera toujours présent, et ce sera toujours aussi difficile de vivre. Mais en attendant, sentiments ou pas, je ne pense pas être capable de déclarer forfait si rapidement.
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:33



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    Je pense avoir terminé. *_*
 
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Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:53



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    Fiche magnifique! J'aime beaucoup le perso wub

    Ca sera donc une nouvelle SERPENTARD. A croire que c'est la journée des verts. =)

    Je t'ajoute à tes groupes et tu peux jouer.
    Bienvenue et bon jeu =)
 
MessageSujet: Re: Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE   
Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE EmptySam 28 Mar - 19:57



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    Merci beaucoup (: ♥
 
MessageSujet: Re: Eleanor •• I don't really trust a sane person. DONE   
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